Mythe syndical: Le syndicat protège les mauvais travailleurs
En tant que syndicat, parfois des membres accusent le syndicat de protéger les mauvais travailleurs. Qu’en est-il vraiment.
Premièrement, que le travailleur ait tort ou raison, nous avons l’obligation légale de juste représentation. Un syndicat peut être mis à l’amende lorsqu’il ne respecte pas ses obligations.
Plus spécifiquement, l’obligation en est une de moyens et non de résultats. Le syndicat doit prendre les moyens pour défendre adéquatement ses membres, sans toutefois avoir une obligation de résultat.
Toute association syndicale détient le pouvoir exclusif de représenter l’ensemble des salariés de l’unité de négociation pour laquelle elle est accréditée, qu’ils en soient membres ou non.
Par conséquent, elle doit respecter le devoir de juste représentation en vertu du Code du travail (articles 47.2 et suivants).
Cette obligation interdit au syndicat quatre types de conduite : la mauvaise foi, le comportement arbitraire, la discrimination et la négligence grave envers les salariés de l’unité de négociation.
Conduites interdites dans l’exercice du pouvoir de représentation
Mauvaise foi
La mauvaise foi correspond à un comportement malicieux, frauduleux, malveillant ou hostile. Elle implique une intention de nuire ou un comportement vexatoire de la part du syndicat.
À titre d’exemple, la Commission des relations du travail avait reconnu la mauvaise foi d’une association en raison du comportement hostile de l’exécutif syndical à l’endroit du plaignant avec l’intention de lui nuire (2012 QCCRT 0579).
Comportement arbitraire
Le comportement arbitraire implique que, même sans intention de nuire, la réclamation d’un salarié a été traitée sans fondement rationnel, de façon superficielle ou inattentive. Il en est ainsi lorsque la décision du syndicat est prise en l’absence d’une évaluation réelle du dossier ou après une enquête insuffisante. Le salarié est en droit d’obtenir un examen raisonnable de la situation qui permette de cerner les éléments essentiels du problème soulevé, tant pour les faits que le droit. 2 Un comportement arbitraire se manifeste notamment par une idée préconçue, par une volonté injustifiée de ne pas déposer un grief ou de le porter à l’arbitrage, ou par le fait de ne pas laisser la chance au salarié de faire connaître sa version.
Discrimination
Le comportement discriminatoire se traduit par toute tentative de défavoriser un individu ou un groupe sans que le contexte des relations de travail dans l’entreprise ne le justifie (ex. : condition d’ancienneté).
Par exemple, il se manifeste par un traitement différent de celui qui est accordé aux autres salariés, soit par une distinction ou une exclusion qui est faite lors du traitement du dossier d’un salarié ou d’un groupe de salariés. Le refus de traiter un grief parce que le salarié n’est pas membre de l’association constitue un exemple de comportement discriminatoire. Parmi les motifs de discrimination prohibés par les chartes des droits et libertés de la personne, La race, la religion, le sexe, l’orientation sexuelle et l’âge sont quelques exemples de motifs de discrimination prohibés par les chartes des droits et libertés de la personne.
Négligence grave
La négligence grave d’une association renvoie à une attitude marquée par l’erreur grossière ou la faute lourde commise par l’un de ses représentants dans le traitement d’un grief, par exemple :
- un oubli impardonnable;
- une méconnaissance inexcusable;
- un manque évident d’habileté;
- une insouciance ou une incapacité de prendre sérieusement et efficacement en main les intérêts des salariés qu’elle représente.
Le Tribunal, comme la CRT antérieurement, a reconnu qu’il y avait négligence grave en cas de défaut de suivre les étapes ou les délais de la procédure de grief établie à la convention collective (2016 QCTAT 309, 2016 QCTAT 3491, 2016 QCTAT 4231, 2017 QCTAT 447 et 2017 QCTAT 2618).
L’article 47.2 du Code du travail n’impose cependant pas une norme de perfection au syndicat. Les erreurs commises qui ne peuvent être qualifiées de fautes grossières ne consistent habituellement pas en de la négligence grave.
Pour être jugé fautif, le comportement du syndicat doit représenter plus que de l’incompétence ou des erreurs excusables.
En somme, un travailleur qu’on qualifierait de mauvais travailleurs pourrait poursuivre le syndicat si celui-ci refuserait de le représenter.
Ce n’est pas au syndicat de faire la discipline auprès de ses membres, si des mesures doivent être prises, c’est le rôle de l’employeur.
Source : Devoir syndical de juste représentation (gouv.qc.ca)